L’innovation en ingénierie financière islamique

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L’avenir du développement du système financier islamique à travers un accroissement conséquent des actifs islamiques sous gestion est tributaire de deux grands piliers : d’une part  la pérennisation de la solidité financière des banques islamiques et d’autre part leur capacité d’attraction commerciale au-delà de leurs marchés domestiques.

Résumé

L’édification de ces deux piliers passe inéluctablement par une modernisation de l’offre et par l’efficience des mécanismes de gouvernance et de gestion des risques au niveau des banques islamiques. Ainsi une nouvelle ère d’innovation d’instruments structurés et sophistiqués propres à l’industrie financière islamique constitue un incontournable pré-requis.

Cela permettra d’abord de normer aux standards internationaux, l’ALM et le mode de couverture des risques des institutions financières islamiques et en même temps développer un marketing fort et moderne autour d’une palette d’offre financière, différenciée, répondant aux attentes de la clientèle ciblée, offrant une large gamme de produits et compétitive, afin de favoriserl’émergence de véritables marchés de capitaux islamiques matures et efficients capables de drainer de nouveaux entrants, jusqu’au là rompus à la finance conventionnelle.

Ainsi, seule une ingénierie financière moderne et créative, puisant dans l’immensité du Fikh, dans un esprit shariatique épanoui, novateur et indépendant, serait à même de faire sortir cette jeune industrie du sentier battu des produits réplicatifs « shari’a compliant » vers de nouveaux instruments propres « sharia based ».

A ce titre, l’innovation en ingénierie financière islamique, n’est pas un luxe, mais plutôt une condition de survie des institutions financières islamiques leur procurant les moyens de relever les défis auxquels elles sont confrontées.

A travers la présente recherche, nous essayons de projeter la lumière sur la nature des besoins réels des banques islamiques en instruments structurés pour moderniser leur approche en matière de Gestion actif-passif, Gestion dynamique d’actifs (hedges funds), Gestion indicielle, Gestion de liquidité (produits monétaires islamiques) et surtout Gestion des risques de marchés à travers l’usage à bon escient de nouveaux produits dérivés islamiques.

Aussi, cette étude à l’ambition d’identifier les obstacles réels à cette modernisation nécessaire, notamment : l’indépendance, la compétence technico-financière des Comités Fiqhiques et Shari’a Board et leur ouverture sur leur environnement. Eu égard à la carence manifeste en capital humain qualifié et à double compétence financière et shariatique (Fiqh Al-Mouamalat et Ousoul Al-Fikh), la recherche et développement reste très timide, l’innovation butte fréquemment sur la faible maitrise financière des scholars, eux-mêmes freinés dans leur élan par la faible actualisation de la jurisprudence, datant de plusieurs siècles et souffrant foncièrement d’une incohérence structurelle, objet de controverses perpétuelles entre les disciples de plusieurs écoles de pensée.

L’enjeu fondamental pour la finance islamique est d’identifier les pratiques et outils de gestion des risques les mieux adaptés à ses principes. Des efforts ont récemment été accomplis dans des pays tels que la Malaisie, l’Egypte et Bahreïn en vue de traiter cette question ainsi que l’ambiguïté juridique issue des différentes interprétations de la shari’a. Ces questions devraient s’estomper dans un avenir proche grâce aux progrès réalisés par les organismes de supervision tels que l’Islamic Financial Service Board (IFSB), l’International Islamic Financial Market (IIFM), l’Accounting and Auditing Organization of Islamic Finance Institutions (AAOIFI), et bien d’autres encore.

Enfin la finance islamique a besoin aujourd’hui de construire un business modèle fiable, moderne, complet, global et surtout universel.

pdfIconTélécharger l’étude complète réalisée par Khalil LABNIOURI
Cadre bancaire – Doctorant en ingénierie financière islamique

Un commentaire

  1. Je voudrais apporter quelques commentaires à caractère général.
    Je considère que le grave risque qui menace la finance islamique est la tendance à l’imitation de  »produits » financiers inutiles -comme les produits dérivés ou autres CDS ou le THF sous des justifications peu convainquantes sous prétexte de faire preuve d’innovation et d’ingénierie financières en s’éloignant des principes fondamentaux qui distinguent effectivement la FI à savoir une gestion financière éthique base sur le partage des profits et des pertes ou règle des PPP, loin de tout subterfuge ou hila.
    Malheureusement, la tendance des banques islamiques à copier les produits de la finance conventionnelle avec l’aval des membres des sharia boards manquant de connaissance en la matière traduit davantage la recherche de solutions de facilité que la volonté de traduire les principes de l’éthique de l’islam dans le domaine financier, comme le montre la part toujours faible des formules de financement basées sur la règle du PPP dans la structure des bilans des BI par rapport à d’autres comme la Mourabaha qui s’apparente à des crédits non risqués.
    C’est donc à ce niveau que le débat doit se concentrer .

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