Sukuk : quel potentiel au sein du marché corporate et institutionnel de la finance islamique au Maroc ?

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Une étude du Conseil Déontologique des Valeurs Mobilières (CDVM) s’intéresse au potentiel de l’épargne institutionnelle pouvant être drainée par les instruments financiers islamiques, principalement les Sukuk.

Le CDVM a mené à cet effet une enquête ciblée auprès d’un échantillon d’émetteurs et d’investisseurs institutionnels marocains. Un questionnaire a été adressé à un échantillon d’émetteurs constitué de banques ainsi que d’entreprises cotées du premier compartiment ayant déjà émis des obligations cotées. Quant aux investisseurs institutionnels, le questionnaire a été adressé aux sociétés de gestion d’OPCVM.

Le Maroc, de par sa situation géographique, aux portes de l’Afrique, de par sa politique et son contexte de développement économique, a de grands atouts à faire valoir pour se positionner en tant que réel hub africain de la finance. Fort d’un projet structurant (CFC- Casablanca Finance City) et d’une réelle volonté de réformer son marché des capitaux (plusieurs projets sont en phase d’adoption, notamment le projet relatif à la loi bancaire et le projet d’amendement de la loi sur la titrisation), le marché financier marocain devrait consolider son attrait, auprès de la population locale dont le potentiel d’épargne demeure encore sous exploité et aussi auprès des pays excédentaires en liquidité.

Dans cette optique, la mise en place d’un cadre légal régissant la finance islamique présente plusieurs avantages : sur le plan interne, répondre à un besoin latent qui s’inscrit dans une politique de bancarisation de la population et sur le plan externe, contribuer activement et sereinement au développement de la finance islamique marocaine sur l’échiquier international.

Au même titre que la finance conventionnelle, la finance islamique a besoin d’organes de contrôle et de régulation que ce soit pour le secteur bancaire, pour les marchés financiers ou encore pour le secteur de l’assurance et celui de la microfinance. Sur un plan structurel et organisationnel, le Maroc dispose d’une infrastructure financière et institutionnelle adéquate pour accueillir la finance islamique. Les autorités de contrôle et les acteurs privés en présence ont des caractéristiques et des outils qui peuvent être très facilement adaptés. Si d’un point de vue légal et réglementaire il y a encore des aménagements à apporter pour clarifier certains aspects techniques et permettre à la finance islamique de se développer dans un environnement sécurisé, et qui sont prises en charge dans le cadre des importantes réformes législatives engagées par les autorités financières marocaines – refonte de la loi bancaire introduisant les banques participatives et refonte de la loi sur la titrisation introduisant les Sukuk – il est possible d’ores et déjà de constater que sur le plan institutionnel les « ingrédients » sont déjà réunis.

Largement mis sous les projecteurs au lendemain de la crise financière qui a démarré en 2008, les principes de la finance islamique ont souvent été présentés comme de bons remèdes à certains maux de la finance conventionnelle à condition qu’ils puissent s’intégrer dans un cadre organisationnel global.

Par ailleurs, en dehors des aspects réglementaires et fiscaux, le principal challenge de la finance islamique reposera sur l’innovation pour que soient proposés des produits qui réunissent à la fois les critères de conformité à la réglementation, de conformité aux préceptes islamiques mais également de rentabilité financière et économique. En outre, le marché marocain se présentant, aussi bien au niveau « retail » qu’institutionnel, comme un marché de l’offre et non comme un marché de la demande, il appartient donc aux acteurs financiers de construire cette offre de manière intelligible. En la matière, les Sukuk, instruments phares dans l’industrie financière islamique, apportent des solutions et des alternatives fortement intéressantes pouvant répondre aux besoins de tous les agents économiques, que ce soit l’Etat pour ses besoins de financement, mais aussi les PME, les grandes entreprises qu’elles soient cotées ou non, les banques et aussi les assureurs. Les Sukuk répondent d’un côté aux agents qui ont besoin de liquidité, et d’un autre côté ils apportent une solution de diversification aux investisseurs soucieux de trouver des produits financiers conformes à leurs exigences éthiques.

A travers cette étude le CDVM tente principalement de dresser de manière didactique un panorama des produits financiers islamiques, notamment les Sukuk, leur nature juridique, économique et financière et d’analyser leur attractivité et leur potentiel sur la place financière marocaine. 

Par ailleurs, il est important de noter que les sukuk ne sont pas réservés aux seules sociétés cotées ou aux fonds souverains. Ils peuvent être d’excellents compléments aux produits bancaires et apporter des solutions de financement aux petites et moyennes entreprises non cotées sous réserve d’ajustements légaux et, bien entendu, que celles-ci disposent de l’expertise et des moyens nécessaires pour supporter leur mise en oeuvre.

Le lancement des sukuk au Maroc nécessite la mise en place d’un cadre réglementaire sécurisé et surtout un dispositif fiscal approprié. Dans ce cadre, une réflexion est menée par le législateur dans l’objectif de faire évoluer la loi relative aux fonds de placements collectifs en titrisation (FPCT). Ce texte doit permettre la structuration de sukuk dans un environnement juridique sécurisé avec un FPCT qui aura les caractéristiques d’un SPV et répondra aux spécificités des titres islamiques. Cette réforme devra par ailleurs prévoir la souplesse nécessaire afin d’éviter d’alourdir le mécanisme d’une émission de sukuk.

Sécurité et souplesse juridique, conformité sharia, viabilité économique sont autant d’éléments qui constituent le challenge intrinsèque des produits financiers islamiques. A ce titre, le Maroc dispose de tous les atouts pour relever ce défi. Il appartient désormais aux acteurs privés et publics de stimuler ce marché.

pdfIcon Télécharger l’étude du CDVM

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