- Salam et Istisnaâ correspondent au financement des approvisionnements et aux crédits d’investissement.
- Banque Al Maghrib et le Groupement professionnel des banques du Maroc ont tenu une première réunion à ce sujet le 20 janvier 2009.
- Les produits seront lancés cette année.
- Ils ont été audités et jugés conformes aux préceptes de la chariaâ par un organisme spécialisé basé à Bahreïn.
Un peu plus d’un an après le lancement de trois produits bancaires alternatifs (Ijara, Mourabaha, Moucharaka) et alors que la demande est encore hésitante, de nouvelles offres sont annoncées. Sous la houlette de Bank Al Maghrib, le secteur bancaire s’apprête à lancer une nouvelle vague de crédits respectant la chariaâ. A ce titre, le Groupement professionnel des banques du Maroc (GPBM) a tenu le 20 janvier 2009 une réunion avec la direction de la supervision bancaire de l’institut d’émission. «Il s’agit de la première réunion relative au lancement de deux nouveaux produits alternatifs. Les deux parties règlent actuellement les détails du lancement sur le marché qui ne devrait pas tarder», confie une source proche du dossier. Les deux nouveaux produits sont Salam et Istissnaâ. Contrairement à leurs trois prédécesseurs qui visent les particuliers, les deux nouveaux produits seront, eux, destinés aux entreprises.
Un contrat tripartite réunissant la banque, le fournisseur et le client
Le premier produit s’appellera Salam. Il s’agit d’un contrat tripartite entre la banque, le fournisseur et le client. «Ce produit est censé remplacer le crédit à la trésorerie puisqu’il permettra à un professionnel d’acquérir une marchandise en recourant à un crédit mais sans payer d’intérêts» , explique-t-on auprès de BAM. Dans un premier temps, la banque achète la marchandise chez le fournisseur en fixant le prix ainsi que toutes les caractéristiques de la marchandise. Le deuxième rapport lie la banque, qui devient juridiquement propriétaire de la marchandise, au client. Ce dernier acquiert alors, et au titre du même contrat, la marchandise auprès de la banque qui lui facture une marge bénéficiaire sur le prix de la marchandise. Ainsi, le professionnel devient propriétaire d’une marchandise qu’il payera sur plusieurs échéances mais sans aucun intérêt.
Ce contrat doit néanmoins respecter plusieurs règles propres au droit commun et à la chariaâ. «Le contrat doit déterminer avec précision les caractéristiques techniques de la marchandise. Le prix doit également être connu dès la signature du contrat», souligne la même source. Et si les banques étrangères utilisent principalement le produit Salam pour le financement des agriculteurs et des artisans, «au Maroc, nous travaillons pour l’adapter à plusieurs autres secteurs tout en respectant les principes de la finance islamique» , confie-t-on auprès de BAM.
Le second produit «Istissnaâ» fonctionne selon le même principe. Ainsi, la banque appelée «Moustassniâ» commande la fabrication de biens auprès du fournisseur appelé «Assaniâ» pour le compte de son client. Prenons par exemple le cas d’un client qui sollicite un prêt bancaire pour la construction d’une usine. Dans un contrat Istissnaâ, le prêt n’est pas débloqué au profit du client mais pour le fabricant. La banque devient alors propriétaire de l’usine qu’elle revend au client avec une marge bénéficiaire qui remplace l’intérêt. Même s’il ressemble beaucoup au produit Salam, le contrat Istissnaâ est différent sur quelques points. Par exemple, il y a obligatoirement un processus de transformation de la marchandise, objet du contrat. Les juristes de BAM relèvent une seconde spécificité. «L’avance sur le prix n’est pas obligatoire au moment de la signature du contrat Istissnaâ. C’est la banque qui décide, contractuellement, à quel moment elle procédera au paiement de la première avance», souligne-t-on auprès de l’autorité de tutelle bancaire. Ce deuxième produit sera essentiellement destiné aux grands projets industriels.
Le traitement fiscal réservé à ces produits n’est pas encore défini
Et comme tout produit bancaire islamique, Salam et Istissnaâ respectent les préceptes de la chariaâ. «Avant leur lancement sur le marché marocain, ces deux contrats ont été audités et jugés conformes aux préceptes de l’Islam par l’Auditing Accounting organisation for islamic Institutions (AAOFI), un organisme international basé à Bahreïn et spécialisé dans la conformité des produits financiers à la chariaâ», poursuit la même source. Chargée d’édicter les règles comptables applicables aux produits islamiques, cette organisation dispose, au niveau de tous les pays membres, d’oulémas qui jugent de la conformité des produits islamiques par rapport à la chariaâ. «L’avis de cette organisation est d’autant plus important que ses oulémas ne sont pas limités par un rite spécifique (NDLR, malekite, hanbalite, chafiîte et hanafite)», explique un haut responsable à BAM. Selon lui, l’avis favorable de l’AAOFI sera un atout dans les négociations avec le conseil national des oulémas.
Enfin, il faut savoir qu’avant la mise sur le marché de ces deux produits, BAM et le GPBM devront se réunir avec la Direction générale des impôts (DGI) pour définir le traitement fiscal réservé à ses produits. «Si la mise en œuvre du Salam et de l’Istissnaâ pose problème au niveau fiscal, rien ne nous interdit de négocier avec la DGI une adaptation ou même des modifications de la loi fiscale», estime le responsable. Pour illustrer ses propos, il cite l’exemple du produit bancaire alternatif Mourabaha qui existe déjà sur le marché. «Au moment de son lancement, ce produit posait un problème de doublement d’imposition au niveau des droits d’enregistrement. Mais ce dysfonctionnement a été réglé par la Loi de finances 2009 qui a évité la double imposition en appliquant le droit d’enregistrement à la seule première opération d’acquisition qui est réalisée par la banque. Ainsi, l’acquéreur n’est plus tenu de payer des droits d’enregistrement», souligne ce haut responsable. Concrètement, les deux produits précités suivront la même procédure de lancement appliquée par BAM pour les trois autres contrats. Autrement dit, le cadre réglementaire de Salam et Istissnaâ s’inscrira dans la continuité de la recommandation n° 33/g/2007 qui réglemente les produits alternatifs (Mourabaha, Ijara et Moucharaka). Ce dispositif sera réaménagé pour englober les produits Salam et Istissnaâ une fois qu’ils seront au point.
Source : Naoufal Belghazi, La Vie Eco 30/01/2009
@ Jmal Basma :
En apparence le salam et le tawarruq se ressemblent. La principale différence réside dans le besoin du client et l’usage qu’il va faire de la marchandise ou du bien financé. La définition du salam est donnée dans l’article ci-dessus.
En ce qui concerne le tawarruq, c’est un contrat où la banque achète une marchandise et la vend immédiatement à son client avec un paiement différé dans le temps. Le client vend alors cet avoir à un tiers contre un paiement immédiat. Le résultat est que le client reçoit le montant en cash et doit rembourser à la date différée, avec une marge pour la banque. Généralement ce type de contrat porte sur des marchandises ou matières premières facilement négociables.
Quelle est la différence entre « salam » et « tawarruq » ? merci
Selon l’hebdomadaire La Vie Eco du 08 février 2010, Bank Al-Maghrib (BAM) et le Groupement professionnel des banques du Maroc (GPBM) travaillent actuellement sur la conception d’un cadre légal pour deux nouveaux produits destinés aux professionnels : les contrats Salam et Istissnaâ.
Le produit Salam, dont l’équivalent dans l’offre bancaire classique est «l’avance sur marchandise» (ASM) mais seulement pour les biens meubles, fait l’objet d’un contrat à double engagement. Dans un premier temps, le client formule une demande auprès de l’établissement de crédit sollicitant son accord pour acquérir un bien déterminé. C’est le premier engagement. Ensuite sur la base du devis produit par le client, l’établissement de crédit acquiert ledit bien dans le but de le lui revendre dans les conditions et modalités prévues par le contrat (deuxième engagement).
Actuellement à l’étude, Al Istisnaâ, l’autre produit, s’apparente au leasing immobilier réservé aux professionnels et peut concerner aussi bien les biens meubles qu’immeubles. Il se définit comme étant l’opération par laquelle le donneur d’ordre (Moustasni’i), généralement la banque, demande au fournisseur (Sani’i) de lui fabriquer une marchandise ou un ouvrage dont les caractéristiques sont décrites dans le contrat. La banque paiera le fournisseur et revendra le bien à son client sous forme de paiements fractionnés.
http://www.lavieeco.com/economie/15763-produits-bancaires-alternatifs-la-marge-payee-sur-mourabaha-devient-deductible-des-impots.html
En théorie, l’auto-construction d’un logement pourrait être financée par un contrat de type Istisnaâ. Le lancement de ce type de contrat au Maroc avait été annoncé début 2009 par Bank Al Maghrib et le Groupement professionnel des banques du Maroc : https://ribh.wordpress.com/2009/01/30/maroc-salam-istisnaa/
A titre d’exemple, en Algérie, la Banque Al Baraka propose ce financement pour l’auto-construction : http://www.albaraka-bank.com/istisna.htm . Le contrat d’Istisnaâ fait intervenir 3 parties : la banque, le maître d’ouvrage (le client) et l’entreprise de construction. La banque paie l’entreprise de construction pour le compte du client, et ce dernier rembourse la banque y compris une marge bénéficiaire, en bénéficiant de facilités de paiement étalées sur une durée convenue.
En pratique, il faut voir le traitement fiscal de ce type de financement pour en mesurer la compétitivité. Les banques marocaines ont encore peu communiqué sur ce produit.